edition de l'ariane

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Le propre des artistes majeurs est d’excéder les groupes pour trouver un langage qui n’appartient qu ‘à eux. Intégré, dès le début, à l’Ecole de Nice avec Arman, Raysse et César qui furent ses amis, Claude Gilli propose une imagerie essentiellement fondée sur la découpe. Parti de l’assemblage d’objets kitsch de récupération dans ses « ex-votos », il mêle l’intitulé religieux à l’imagerie et aux rebuts dérisoires des années 1960. L’art sacré se confirme et se dévoie dans le tabernacle alliant les couleurs pop aux pin’up, les chromos surannés aux reliques, mimant l’offrande par la silhouette d’éléments d’usage courant, peints et installés comme des friandises. Des formes comme des ombres traversent ce champ de crédulités.
Le fantastique forain rejoint la mythologie du sud qu’il transmet et glorifie en se souvenant des visions des peintres célèbres qui le précédèrent : arbres de couleurs franches devenus bleus sous la diffraction de la lumière. Il serait ainsi une sorte de pop fauve travestissant la pauvreté et le sordide par la couleur et par l’ironie joyeuse.
La frontalité de ses sculptures et volumes, appartenant plus aux murs qu’à l’installation, même en grande dimension, intègre aussi bien des matériaux lourds comme l’acier dont il sublime la pesanteur par la légèreté des thèmes, que la transparence des plexiglass. Le boulonné, le fil de fer, le dur et le souple, le solide et le fragile se côtoient et se rassembent dans une proposition qui part de l’émerveillement et aboutit à « La Joie de vivre » dont Matisse fit un tableau emblématique.
La foule des lots bas-de-gamme des supermarchés est annoblie dans la boîte qui fut un modèle de présentation privilégié à partir de Joseph Cornell, sans contredire l’immersion dans la nature, à travers les paysages particulièrement évocateurs de la mer et du ciel méditerranéens, ou la procession d’escargots hermaphrodites.
Une générosité d’esprit et de création traverse sans cesse l’invention toujours à l’œuvre de cet artiste éblouissant. Humour et sensualité voyagent à pied sur l’ « escagodrome » de Claude Gilli.
Il fut aussi un des premiers à entreprendre la fabuloserie des coulées et des cafetières devenues tragiquement immobiles ou prodigieusement sexuelles. « Merci, j’ai retrouvé mes pieds » signe un titre de 1961. Beau détournement pour cet artiste qui jamais ne renonça à avancer !
Tita Reut


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